Après un premier EP « Un jour », Mohican revient avec un album « Les autres » le 13 mai ! Un album qui reflète pour Lucas Elzière, âme et tête pensante du groupe, un partage des textes fouillés qui parlent de notre temps et celui de la chanson mariées aux audaces électroniques les plus diverses.
Qualifié, peut-être un peu vite, de « Stromae rennais » par un grand quotidien régional, Lucas Elzière, âme et tête pensante de Mohican, se choisirait plutôt d’autres figures tutélaires. Tel Baloji et son électro ethno-world. Ou l’écrivain-chanteur Gaël Faye. Avec ce dernier, il partage le goût des textes fouillés qui parlent de notre temps et celui de la chanson mariée aux audaces électroniques les plus diverses, comme l’envie de partage collectif plus que de pure carrière solo. Et quoi de plus naturel pour l’ancien étudiant en sociologie que de s’immerger dans les turpitudes de ce monde, de se coltiner les doutes et les interrogations, aussi bien intimes que sociales, de l’homo occidentalis du XXIe siècle ? Lucas Elzière et ses complices relèvent le challenge avec autant de panache que d’humilité, ne se montrant jamais donneurs de leçons. Avec générosité aussi, laissant
à chaque auditeur.rice tout loisir de choisir, au fil des flux de mots enchainant les images et les idées, celles et ceux qui parleront le mieux à ses propres sentiments, à ses propres préoccupations.
« Les chansons sont comme des tableaux. Ce sont des fresques dans lesquelles se déploient plusieurs scènes, plusieurs
thèmes en même temps, détaille Mohican. Des tunnels de mots dans lesquels on se trimballe ». On retrouve dans la musique et chaque morceau de « Les Autres », le nouvel album du groupe, cette architecture de jeux de pistes alternant les ambiances et jouant des ruptures pour mieux multiplier les directions. Avec une constante cependant, parmi quelques titres plus apaisés : une tension et une urgence sous-jacentes qui donnent leur prix à « Les idées brûlent », au « Ventre des fous » ou à cette « Larme fière » qui déploie sur 4 minutes et 44 secondes un son rempli de curiosités et de détails qu’on ne se lasse pas de découvrir, d’explorer, d’inventorier.
Avec cet album, on pourra voir l’aboutissement d’un parcours musical qui s’est frotté, depuis quasiment la tendre enfance, à tous les genres. Mais aussi le manifeste d’une maturité artistique qui a trouvé sa voie.
« Tout gamin, j’inventais des refrains, des mélodies, dans un milieu familial où, avec mes frères et mon père, lui-même chanteur, guitariste et compositeur, la création, l’improvisation, étaient prépondérants », raconte Lucas Elzière, qui se souvient de virées familiales en auto où l’on « tapait le bœuf » en chantant tout au long du parcours.
De cet univers où se sont frottés le jazz, le reggae, le rock, aussi bien que les
chansons de Brassens, de Lhasa ou d’Oxmo Puccino, ce trentenaire ayant
grandi dans les Cévennes avant de s’installer en Bretagne, a gardé la
substantifique moelle, complétant son éducation musicale par quelques années au Conservatoire et une pratique de la trompette, son instrument de prédilection, devenue comme une signature, la marque d’une identité que l’on retrouve dans chaque titre, ou presque, de « Les Autres ».
« Face au côté cérébral des textes, la trompette permet de cracher des émotions, des sensations de manière plus charnelle et
plus directe, tout en apportant une touche de lyrisme aux chansons », glisse Lucas, qui manie aujourd’hui aussi bien les machines que l’instrument à vent. Il n’a jamais été question toutefois pour l’auteur-compositeur soucieux de confronter ses créations à d’autres sensibilités, de se lancer seul dans l’aventure Mohican. Un parti pris bienvenu, tant la basse de Stéphane Rama, alliée aux percussions de Ronan Després et à la palette impressionniste de Loïc Loew, achèvent d’apporter à cette musique une profondeur où l’organique et le synthétique se mêlent étroitement. Ce que l’on pourra vérifier en écoutant le très beau « Regarder les images », qui ouvre l’album avec une petite pluie de notes et un beat accrocheur, pour mieux vous entrainer dans une cavalcade qui résonne comme un appel, bientôt traversé par le souffle chaud de la trompette. Ou le tout aussi fascinant « Un jour » qui, pour un peu, nous téléporterait dans une banlieue de Mexico au son de mariachis ou sur les quais de Montevidéo pour y suivre des yeux les navires en partance.
Au final, Mohican est bien ce groupe tremblé qui renverse les chaises et fait vibrer les murs de pierre, à l’image de cette pochette où quatre silhouettes évaporées dans la lumière nous suggèrent que rien n’est jamais tout à fait certain.